Fern est une veuve d’une soixantaine d’années lorsqu’une centrale ferme ses portes, la laissant sans emploi et transformant la région en village fantôme. Elle décide de déménager dans une autre ville, occupant des emplois saisonniers.
« NOMADLAND » … Ce film qui a remporté trois des plus prestigieux prix lors de la 93e cérémonie des Oscars, dont celui de meilleur film et de meilleure réalisatrice pour Chloe Zhao, est actuellement disponible au CINEATLAS.
On vous laisse découvrir la bande-annonce :
2011, les effets de la crise économique de 2008 continuent à malmener les petits gens partout dans l’Amérique. Fern vend ses dernières possessions dans le petit patelin du Nevada, Empire, et prend la route … derrière elle, le souvenir d’un mari récemment décédé et devant elle un avenir incertain, dans une Amérique qui a perdu son surnom de « Land of Opportunity».
Après ce début annonciateur déjà d’un film bien ancrée dans l’identité américaine vagabonde, on se retrouve à l’intérieur du van de Fern … elle parcours les paysages enneigés et chante « What Child Is This ? », une chanson qui annonce noël, et dont les sonorités rappellent (sûrement volontairement) la chanson d’ouverture de FARGO : Film de 1996 des frères Cohen, et dont l’un d’eux justement (Joel) est le mari de Frances McDormand (l’interprète de Fern).
Bref, Chloé Zhao, la réalisatrice, a des choses à raconter … elle qui n’est pas née aux États-Unis, elle apporte avec elle un regard nouveau sur le pays de l’oncle Sam… que ce soit sur l’évolution de la société, mais aussi sur son propre Cinéma.
« Nomadland » – La réalisatrice Chloé Zhao et l’actrice principale Frances McDormand
Chloé Zhao va donc revisiter deux genres phares du cinéma américain :
– Le Western, avec sa manière de filmer la terre et les étendus naturels de l’West américain, … mais aussi, la vulnérabilité de la silhouette de Fern devant des paysages d’une sauvage austérité … sans oublier sa solitude, mais surtout son intégrité et sa courtoisie (le modèle du héros à la John Ford).
– Le road movie, où un personnage traverse l’Amérique en quête de soi, mais surtout en quête de l’Amérique (comme dans le sous-titre de l’affiche originale d’Easy Rider) … sans oublier le ton clairement contestataire muet du long-métrage.
Mais outre le cinéma américain, il y a aussi un peu de la nouvelle vague française dans sa manière de filmer en éclairage naturel, … mais il y a surtout à mon goût, clairement, beaucoup de néoréalisme italien, avec un casting notamment, d’acteurs qui jouent leurs propres rôles (Presque tous les vagabonds que Fern rencontre sont des vrais « van dwellers » dans leurs vrai vie véritable).
Mais au-delà de tout ça, de quoi nous parle vraiment le film …? Le titre du roman de Jessica Bruder, d’où le scénario est tiré, est très explicite : « Nomadland : Surviving America in the Twenty-First Century », cette histoire est donc celle des oubliés de la mondialisation, de l’ère des GAFAM, … ces anciens hippies, ces anciens professeurs, ces bosseurs d’une autre époque, sont maintenant rejetés par le monde moderne, car jugés non adéquats au rythme de productivité dont elle a besoin.
Alors que ces retraités (ou proches de la retraite) avaient rêvé, jeunes, de prendre la route comme « l’avant-garde » d’une société en mutation pour la porter au mieux. Voilà qu’aujourd’hui, ils ne sont plus que la chair à canon d’un pays devenu véritablement un « No Country For Old Man ».
Le film mérite donc largement ses récompenses, et à l’honneur de sacré la première réalisatrice asiatique de l’histoire sur le podium du cinéma Hollywoodien.
Quant au jeu d’acteur de Frances McDormand, la seule chose que je peux vous dire c’est que, depuis le début de cet article, je ne parle que de Fern, son personnage, force est de constater que l’actrice a réussi, encore une fois, à se faire oublier … et que devant nos yeux ébahis et nos cœurs palpitants, on ne voit plus FERN.